Les fonctions d’enseignement non seulement permettent mais demandent, dans l’intérêt même du service, que la libre expression et l’indépendance du professeur soient garanties sous les réserves que lui imposent les principes de tolérance et d’objectivité. L’enseignant est seul responsable des moyens qu’il met en śuvre pour exercer son activité, comme de la forme qu’il donne à son enseignement.
Ceci est d’autant plus vrai que le niveau d’enseignement confié au professeur est élevé. Ainsi, la loi oblige-t-elle les établissements d’enseignement supérieur à offrir à leurs enseignants les moyens d’exercer leur activité "dans les conditions d’indépendance et de sérénité indispensables à la réflexion et à la création intellectuelle" (article L 123-9 du Code de l’éducation).
Concernant le professeur agrégé, le niveau universitaire des épreuves du concours dont il est lauréat atteste la nature éminemment intellectuelle des fonctions qu’il convient de lui attribuer : les professeurs agrégés doivent être affectés prioritairement dans les classes de spécialité préparant directement aux études supérieures (première, terminale), et dans l'enseignement supérieur, lycéen (STS, CPGE) ou universitaire. Le SAGES demande, par conséquent, que la formation pratique donnée aux agrégés débutants soit mieux centrée sur ce qui correspond à leur vocation : la transmission des savoirs au niveau universitaire ou pré-universitaire.
Où qu’il enseigne, le professeur doit être absolument libre de la conception et de la mise en oeuvre de son enseignement. Seul échappe à sa liberté le choix des contenus à enseigner, quand ceux-ci sont définis ou précisés dans le cadre des programmes officiels. Ni l'interventionnisme de l’administration, ni l'action d'associations de parents d'élèves, ni les menées des gourous des sciences de l'éducation, ni le désir de certains syndicats de collectiviser l'action des professeurs ne doivent restreindre cette fondamentale autonomie professionnelle. L’insidieuse prolifération dans nos établissements des réflexes de consommateurs, l’élève ou l’étudiant se prenant de plus en plus pour un "client roi", autorisé ou même encouragé à tout exiger d’un professeur simple "prestataire de service", doit être combattue avec la plus ferme détermination. C’est l’intérêt même de l’élève de comprendre que l’acquisition des savoirs et savoirs-faire ne se négocie pas en termes commerciaux, qu’il n’a pas le choix du "produit" d’enseignement et qu’il n’a d’autres moyens de progresser que ses propres efforts.
A considérer certains syndicats enseignants, on pourrait croire :
Pour répandue et partagée que soit cette manière de procéder, elle n'est pas en usage au SAGES. L'état de fait que nous décrivons plus haut nous a d'ailleurs longtemps dégoûtés de prendre part au syndicalisme, avant que nous estimions que laisser le champ libre aux autres syndicats revenait à encourager les dérives que nous dénonçons ici.
Mais qu'est-ce qu'un syndicat ? C'est, stricto sensu, "un
groupement constitué par des personnes exerçant une même
profession, ou des professions connexes ou similaires, pour l'étude ou
la défense des droits ainsi que des intérêts matériels
et moraux, tant collectifs qu'individuels des personnes visées par les
statuts" (Vocabulaire juridique, Dalloz).
A l'heure actuelle, le SAGES est le seul syndicat enseignant qui corresponde à
cette définition et qui y corresponde de propos délibéré :
notre syndicat s'interdit d'aller au-delà de ce qui doit
être l'objet social et le domaine d'action d'un syndicat de professeurs :
il n'empiète ni sur le domaine privé des élèves, des étudiants et des
familles, ni sur ce qui relève par nature de la liberté individuelle du
professeur ou qui porterait atteinte au caractère intellectuel et indépendant
de son activité. Et il s'interdit également de prendre position ou
d'agir à l'intérieur de ce qui relève exclusivement du peuple souverain par
l'intermédiaire de ses élus, des partis politiques, des églises ou
des associations diverses.
En somme, le SAGES prend position et agit dans son rôle de défenseur et de représentant si, et seulement si, certains faits ou certains actes ont une incidence sur les intérêts qu'il a en charge de défendre, et dans la mesure de ces intérêts et de cette défense.
Le SAGES, un syndicat, ni moins, ni plus.
Le type de syndicalisme que représente et défend le SAGES découle de sa conception du professeur agrégé, intellectuel et indépendant.
Un syndicat doit participer à l'élaboration de la politique et des modalités d'enseignement, par le biais de propositions et de discussions avec le gouvernement et l'administration. Mais il ne doit pas mener une politique de cogestion, telle qu'elle est voulue et pratiquée par les syndicats actuellement majoritaires, et consentie par l'administration : de ce consentement, ces syndicats ont parfois fait leur "fonds de commerce". Ainsi, il est inadmissible pour le SAGES que, par exemple, les résultats des mutations et des avancements soient annoncés par certains syndicats aux professeurs concernés plusieurs mois avant que l'administration daigne s'en charger.
Par ailleurs, l'étude et la défense de la profession des professeurs agrégés exigent un syndicalisme qui soit adapté à la catégorie représentée et défendue (un syndicat, ni moins, ni plus).
Les dirigeants du SAGES s'efforcent donc de satisfaire aux exigences de niveau et de tenue qu'ils estiment être attendue de la part des professeurs qu'il syndique (professeurs agrégés dans le second degré, et PRAG -ou professeurs occupant les mêmes fonctions- dans le supérieur. Ils refusent également toute compromission qui serait susceptible de porter atteinte à l'indépendance et au caractère intellectuel de leur activité.
Ainsi, nous pensons que, aussi digne et respectable qu'elle soit, l'activité syndicale ne saurait justifier par elle-même une promotion sur des critères étrangers à ceux normalement requis. Et pourtant, combien de dirigeants d'autres syndicats, n'enseignant pas ou peu, ont été promus agrégés au tour extérieur ou hors-classe… !
Ainsi, le SAGES ne saurait marchander ni transiger sur ce qui constitue les droits fondamentaux des professeurs qu'il syndique. C'est parce que de pareils marchandages sont pratiqués depuis des années au détriment des professeurs agrégés que leurs droits et leurs intérêts se trouvent aujourd'hui menacés dans leur substance même.
Adhérer aux autres syndicats, ne pas voter pour le SAGES aux différentes élections ou ne pas adhérer au SAGES, c'est cautionner activement ou passivement un type de syndicalisme qui concourt à la disparition du corps des agrégés ou, ce qui revient au même, à son aliénation à l'administration ou aux "sciences" de l'éducation.