La naissance du SAGES, le 13 janvier 1996, répond à des considérations structurelles et conjoncturelles. Depuis longtemps déjà, le syndicalisme enseignant dans le second degré semble prisonnier d'une stratégie pluri-catégorielle et co-gestionnaire, dont les premières victimes sont les personnels enseignants eux-mêmes.
À partir de la seconde moitié des années 1980 les PRAG (professeurs agrégés affectés dans l'enseignement supérieur) deviennent de plus en plus nombreux au sein de l'Université. Ils se trouvent dans une situation bancale, qui n'intéresse ni les syndicats du second degré, dont ils ne relèvent plus, ni ceux du supérieur, qui ne s'intéressent qu'aux enseignants-chercheurs ; et leurs revendications ne reçoivent pour toute réponse des syndicats et associations que l'invitation à retourner dans le second degré ou à devenir maîtres de conférences.
Du fait de l'impossibilité de faire évoluer de l'intérieur les syndicats existants, comme du fait de la spécificité des questions relatives aux professeurs agrégés, notamment dans le supérieur, la création d'un syndicat catégoriel apparaît donc peu à peu comme la seule solution. C'est une grave attaque contre le statut des PRAG, pendant l'hiver 1995, qui va conduire à la création du SAGES. Quelques directeurs d'écoles et des formations d'ingénieurs proposent en effet que les TP soient comptés pour 2/3 de TD avec un service statutaire maintenu à 384 h TD pour les PRAG, ce qui eût pu conduire à un service moyen de 18 h de TP par semaine pour certains PRAG. Aucun syndicat ni aucune organisation, pourtant dûment avertis par deux des futurs créateurs du SAGES, ne prend la peine de seulement contester cette scandaleuse proposition d'aggravation d'un statut déjà peu favorable.
Un petit groupe de PRAG et de professeurs de CPGE se forme alors autour des initiateurs du projet SAGES. D'abord limité à ces deux catégories de professeurs, ce nouveau syndicat tient son assemblée constitutive le 13 janvier 1996 à Marseille.
Le SAGES, dont la doctrine est centrée depuis le début sur la dimension fondamentalement universitaire du professeur agrégé,
abordera trois ans plus tard, en 1999, le champ du second degré, pour lutter, là aussi, contre les coups portés aux conditions d'exercice
des agrégés affectés en lycées et collèges.
Fin 2015, près de 20 ans après sa création, il étend, dans l’enseignement supérieur,
son champ de syndicalisation aux professeurs qui occupent les mêmes fonctions que les PRAG, en particulier les PRCE.
À la naissance du SAGES, quelques jours avant l'assemblée constitutive du 13 janvier 1996, certains collègues universitaires, approuvant notre
démarche, nous suggérèrent toutefois de modifier notre intitulé en remplaçant "agrégés DE l'enseignement supérieur" par "agrégés DANS l'enseignement supérieur".
Mais depuis le "décret Lang" de 1993 est apparu pour les professeurs agrégés affectés dans l'enseignement supérieur un néologisme
insidieux puisqu'il y est question d' "agrégés du second degré" affectés dans l'enseignement supérieur.
Ce qui a pu d'abord apparaître comme une erreur a depuis été repris à de multiples reprises par l'administration,
bientôt imitée par la presse et par une grande partie de nos collègues universitaires. Monsieur Jack Lang, agrégé de droit, aura probablement
voulu distinguer son agrégation (réussite à un concours nécessitant préalablement l'obtention d'un doctorat) des autres agrégations, en attribuant
à celles-ci un qualificatif qui ne pouvait s'appliquer à l'agrégation de droit, laquelle confère à ses lauréats le grade de professeur agrégé des facultés de droit.
Mais, malheureusement, sur la lancée de cette appellation subreptice "d'agrégés du second degré", s'est développée une entreprise de dénigrement des agrégés.
Après avoir été "secondarisés" en mots par l'intitulé du "décret Lang", les agrégés ont ensuite été accusés (suite logique)
d'être responsables de la "secondarisation" de l'enseignement supérieur. Dans ce contexte, l'intitulé d'"agrégés dans l'enseignement supérieur" aurait pu accréditer la thèse selon laquelle les agrégés affectés dans l'enseignement supérieur étaient des gens qui n'étaient pas à leur place, qui serait (selon certains) l'enseignement secondaire. Il importait donc de lever toute ambiguïté. Les professeurs agrégés de l'Université sont "de l'enseignement supérieur" parce qu'ils sont lauréats d'un concours de niveau et de nature universitaires : la réussite au concours atteste non seulement les connaissances nécessaires à l'obtention d'une maîtrise, mais aussi le fait que ces connaissances sont dominées, ce qui confère la capacité à les dispenser à un public universitaire.
Pour des raisons conjoncturelles, le SAGES a syndiqué d'abord les seuls professeurs agrégés en poste dans l'enseignement supérieur. Mais tous les agrégés étant "de l'enseignement supérieur" en vertu de leur réussite au concours, et non de par leur position dans l'enseignement supérieur, le sigle de notre syndicat prenait pleinement son sens en janvier 1999, lorsque le SAGES s'est ouvert également aux professeurs agrégés de l'Université affectés dans l'enseignement du second degré.