Si certains professeurs agrégés ne sont toujours pas convaincus que le SNESup est un syndicat " pot-pourri ", qui n'a pourtant de cesse de dédaigner le corps auquel ils appartiennent, nous les invitons à lire attentivement la page 4 de son bulletin N°361 du 2 décembre 1998.
Le papier, intitulé " Non aux mesures ségrégatives à
l'égard des Certifiés dans l'Enseignement Supérieur " offre
un nième exemple du discours hypocrite et soi-disant fédérateur
de ce syndicat, dont les professeurs agrégés sont les premiers
à faire les frais.
Il s'agit en fait d'une lettre adressée le
3 novembre à Mme DEMICHEL, Directrice des Enseignements Supérieurs
et à Mme MORAUX, Directrice des Personnels Enseignants, co-signataires
de la note de service du 9 septembre, dont le SAGES, par parenthèse,
se félicite parce qu'elle satisfait enfin l'une de ses revendications,
et parce qu'il a beaucoup oeuvré en ce sens.
Nous trouvons dans cette lettre, après les références
et rappels d'usage, un paragraphe portant sur l'hostilité du SNESup au
recrutement de professeurs dits du second degré dans l'enseignement supérieur,
alors que - ou plutôt parce que - la lettre est consacrée
aux Certifiés, c'est-à-dire, ô horreur, à des enseignants
du secondaire.
Ce passage, en apparence incongru et hors sujet, a sans doute pour but de rassurer
les enseignants-chercheurs sur les intentions de leur syndicat de prédilection
vis-à-vis des " enseignants du second degré ". En effet,
nous pouvons lire : " nous demandons que la part des emplois de second degré
créés chaque année, dans l'enseignement supérieur,
ne dépasse pas 10% de l'ensemble des créations d'emplois ".
Or, le paragraphe suivant s'ouvre sur une contradiction flagrante, dont
le SNESup raffole et use à volonté, sans prendre la peine d'envisager
l'effet que pourrait produire, sur ses adhérents, présents ou
à venir, une telle incohérence de propos. Mais il faut bien ménager
la chèvre et le chou.
Jugez plutôt : " pour autant, nous considérons que les enseignants
de Second Degré ont leur place dans l'Enseignement Supérieur en
complémentarité et non en substitution aux enseignants-chercheurs
".
Aussitôt après, le SNESup nous ressert la bonne vieille proposition,
démagogique à souhait, dans le dessein, une fois encore, de calmer
les esprits passablement échauffés des enseignants-chercheurs,
qui pourraient percevoir dans son discours une dérive secondarisatrice
:
" Nous considérons qu'ils (les enseignants du second degré)
doivent avoir la possibilité réelle de faire de la recherche et
-attention, tenez-vous bien- " d'accéder aux corps d'enseignants-chercheurs
".
Et voilà : en dehors de la recherche et d'un corps d'enseignants-chercheurs,
point de salut !
Nous vous avions prévenus : c'est du réchauffé
qui, hélas, fait encore recette.
Il y a quand même quelque subtilité rhétorique dans la
missive au ministère : en trois paragraphes seulement, le SNESup a renouvelé
l'exploit de dire une chose et son contraire, tout en voulant nous faire croire
que les deux sont complémentaires.
C'est du SNESup, du vrai ! (lire aussi
l'excellent article de Patrick Constantin).
Une fois passée l'obligatoire et lénifiante logorrhée
introductive sur la nécessité de faire de la recherche, le SNESup
aborde enfin le sujet annoncé dans le titre : " les dispositions
de la note du 9 septembre (...) procèdent (d'une) volonté de ségrégation
et visent à éliminer de ce niveau d'enseignement, tout un corps
d'enseignants (les Certifiés) qui y a déjà trouvé
sa place ".
Nous savions le SNESup sujet au procès d'intention, mais sans doute pas
à ce point.
Viennent ensuite l'emphase et le mélodrame, le vibrant appel au
coeur, le " préparez vos mouchoirs " : " ce sont près de
6000 certifiés actuellement en poste dans l'Enseignement Supérieur
qui vont ressentir ces mesures comme un déni de leur existence, un refus
de reconnaître leur apport à la création des IUT et des
IUFM, à la constitution des départements de langues dans les universités,
plus généralement la spécificité de leur contribution
pédagogique unanimement reconnue dans la communauté ".
Outre
ces envolées, parfois excessives (contribution pédagogique unanimement
reconnue) nous notons l'absence de toute référence explicite aux
professeurs agrégés, ce qui démontre, une fois encore,
la confusion entre PRAG et PRCE, que le SNESup entretient et propage depuis
fort longtemps.
Car les qualités et la spécificité qu'il
reconnaît avec force lyrisme aux seuls certifiés sont aussi et
surtout celles des agrégés.
Le Ministère, semble-t-il,
ne s'y est pas trompé !
Nous commençons donc à comprendre pourquoi le SNESup ne s'est
jamais ému du fait qu'un certifié ait pu naguère être
recruté sur un poste d'agrégé, en lieu et place de candidats
agrégés.
On comprend moins bien, en revanche, pourquoi il ne s'est
pas davantage ému du fait qu'un agrégé se soit vu interdire
de poser sa candidature à un poste de certifié !
Par relief en creux, l'agrégé voit une fois encore niée
la spécificité de sa formation, de son recrutement et de ses compétences.
Les agrégés qui adhèrent au SNESup, mais qui se refusent
à confondre CAPES et Agrégation, sauront sans doute en tirer les
conséquences.
D'aucuns penseront, peut-être, que le SAGES n'affiche pour les professeurs
certifiés que mépris et condescendance.
Ce n'est ni notre désir ni notre vocation.
Nous souhaitons simplement que l'administration et les organisations syndicales,
de concert, se posent enfin, avec honnêteté et lucidité,
et bien sûr sans démagogie, la question de savoir quelles sont
les compétences et les rôles spécifiques de ces deux corps
d'enseignants dans notre système éducatif.
Nous souhaitons par là même que, poussés, si besoin est,
par le législateur, ils cessent une fois pour toutes de classer les agrégés
et les certifiés dans la catégorie générique dite
des " professeurs du second degré ", car cette appellation est à
tout à la fois impropre, fallacieuse, et de nature à masquer des
différences réelles pourtant prévues - et donc reconnues
- par la seule existence de deux concours de recrutement distincts : l'Agrégation
et le CAPES (Certificat d'Aptitude au Professorat de l'Enseignement Secondaire).
Le SNESup, hélas, ne semble pas encore prêt à cette
démarche.
Car n'en doutons pas, sous couvert de dire " Non aux mesures (prétendument)
ségrégatives à l'égard des Certifiés dans
l'Enseignement Supérieur ", il réclame en fait, pour les Certifiés,
des mesures agrégatives !