Création d'une agrégation de sciences de l'éducation!

Création d'une agrégation de sciences de l'éducation!

Le poisson d'avril 2001 du SAGES ..........

Nous publions ici le texte intégral d'un article paru dans la revue " Repenser l'éducation " (N°104 du 29 mars 2001) annonçant la création d'une agrégation des sciences de l'éducation. Il va de soi que le SAGES est farouchement opposé à un tel projet, et qu'il oeuvrera de concert avec toutes les organisations qui lui sont également hostiles afin qu'il ne voie jamais le jour.

Un prochain numéro spécial du Bulletin Officiel de l'Éducation nationale devrait rendre publique une mesure attendue depuis quelque temps déjà par de nombreux acteurs de l'Éducation, des Directeurs d'IUFM aux Syndicats d'enseignants majoritaires, et dont l'importance parle d'elle-même, puisqu'il s'agit du décret portant création de l'agrégation de Sciences de l'Éducation. Le texte du décret sera d'ailleurs accompagné d'un commentaire en forme de préambule du Ministre lui-même. Cette nouvelle agrégation se démarque de celles actuellement existantes par son caractère résolument innovant, touchant aussi bien à la nature de son programme et de ses épreuves qu'à la composition de son jury.

La première nouveauté concerne les candidats : ceux-ci devront être déjà titulaires d'une agrégation, d'un Capes ou d'un Capet, d'un Professorat des écoles ou d'un doctorat en Sciences de l'Éducation. Mais la nature de ses épreuves est encore bien plus nouvelle, puisqu'on rompt délibérément avec la dichotomie désuète entre épreuves écrites anonymes d'admissibilité et épreuves orales d'admission pour faire place à des formes d'évaluation modernes, totalement inédites dans l'univers des concours " classiques " . L'admissibilité est prononcée à l'issue de deux épreuves  :

- Un oral par équipe où les différents candidats associés (neuf au total) doivent d'abord se concerter sur l'organisation de la préparation de l'épreuve et se répartir les rôles, chaque candidat étant évalué, non au travers de sa contribution personnelle à la production de l'ensemble, mais dans son aptitude au travail en équipe, grâce à la présence dans le groupe d'un candidat fictif, spécialement mandaté par le jury pour une évaluation en situation.
- La présentation d'un mémoire pédagogique, préalablement élaboré, et comportant d'une part, une analyse sociologique d'une problématique pédagogique donnée, et d'autre part, des propositions d'innovation et de réforme dans les pratiques ou le dispositif de formation et d'évaluation des enseignants, en liaison avec la psychologie cognitive et comportementaliste et/ou la didactique.

Quant aux épreuves d'admission, elles comportent un triptyque ainsi composé :

- Un premier oral portant sur la didactique de leur discipline de licence ou maîtrise (on souligne qu'il s'agit de didactique, et non des disciplines pour elles-mêmes) pour les candidats titulaires d'une agrégation, d'un Capes ou Capet ou d'un Professorat de écoles, et sur la didactique générale pour les candidats titulaires d'un doctorat des Sciences de L'Éducation.
- Un second oral portant sur l'enseignement d'une discipline " aussi éloignée que possible de [la] discipline de référence " des candidats (ce qui vise essentiellement à favoriser le décloisonnement disciplinaire). Les titulaires d'un doctorat de Sciences de l'Éducation sont dispensés de cette épreuve.

- Un entretien informel avec le jury permettant d'apprécier les motivations du candidat.

Autre nouveauté capitale : la composition du jury. Celui-ci comprend, pour les épreuves d'admission, des personnalités " extérieures " et notamment des parents d'élèves, choisies " pour leur implication dans les projets éducatifs" .

Mais l'innovation la plus spectaculaire touche aux programmes. Ceux-ci sont tout simplement supprimés ; tout au plus sera-t-il établi chaque année par les Directeurs d'IUFM, en concertation avec les Formateurs de ces Instituts, les Syndicats d'enseignants majoritaires et les Fédérations de Parents d'élèves, une liste non exhaustive de thèmes ayant trait aux Sciences de l'Éducation, assortie d'une bibliographie.

Dans l'esprit des promoteurs de cette nouvelle agrégation, il s'agit de prendre date, et selon les déclarations de l'un d'entre eux, de " privilégier l'état d'esprit plutôt que l'acquisition d'une somme de connaissances figées " : en d'autres termes, favoriser les têtes bien faites au détriment des têtes bien pleines (ou trop pleines). On ne saurait que s'en réjouir, à l'exemple de M. Philippe Meirieu à qui échoit l'honneur de présider le premier jury et qui explique qu' " il y a urgence, passé l'an 2000, à débarrasser l'enseignement des conceptions sclérosées qui l'encombrent encore et l'empêchent d'acquérir le caractère profondément démocratique et centré sur l'intérêt des élèves qu'il doit impérativement présenter " , précisant en outre que dans le jury qu'il est chargé de constituer, il n'y aura pas d'autres agrégés que ceux nommés sur liste d'aptitude, ceci pour éviter, dit-il, que puissent " se reproduire des mécanismes de sélection fondés sur la simple transmission des savoirs, et si justement décriés " ; et Philippe Meirieu voit dans cette nouvelle agrégation " le modèle des futurs concours de recrutement du troisième millénaire " .

Les premiers lauréats de l'agrégation de Sciences de l'Éducation (environ 450 pour la première session) seront affectés pour partie dans les IUFM, où ils seront les fers de lance de la nouvelle politique de formation des enseignants, et pour partie dans les différents établissements scolaires, où ils seront chargés d'animer les équipes pédagogiques et d'initier les enseignants aux innovations pédagogiques impulsées par le ministère.

Hugues Fischer


Agrégation des sciences de l'éducation : poisson d'avril ! !  !


Au travers de ce poisson d'avril, le SAGES a souhaité dénoncer, une fois encore :

  1. la mainmise des IUFM sur la formation des professeurs :

    • cette formation n'est pas adaptée à leur futur métier, et est amenée à s'exercer chaque jour davantage au détriment d'une formation universitaire de haut niveau ;

    • cette formation, qui détermine la titularisation ou non des lauréats des concours évalue en réalité ses stagiaires relativement à leur adaptation à l'idéologie dominante des sciences de l' éducation, idéologie qui semble pour le moins contestable  ;

    et, parallèlement,

  2. le fait que soit remis sans cesse en question les principes républicains élémentaires qui sont à la base de la tenue des concours de recrutement dans la fonction publique :

    • anonymat

    • évaluation selon des critères qui ressortissent du seul critère qui puisse demeurer objectif: celui qui porte sur les connaissances du candidat dans sa spécialité .


Le SAGES, dont la vocation spécifique est la défense des agrégés et du concours de l'agrégation, soumettra prochainement un projet concernant les stages pratiques des lauréats de l'agrégation (rappelons que l'une de ses exigences est la titularisation immédiate de ces lauréats).
Pour autant, il ne demeure pas indifférent aux menaces qui planent actuellement sur le Capes (rapport Brihault-Cornu).